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"MUTUAL ATTRACTION"

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Arik Levy & Zoe Ouvrier

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avril 2023

Arik Levy Zoe Ouvrier Podgorny Robinson Saint Paul

Depuis très longtemps je m'intéresse à l'art africain, océanien, et aux objets anciens en général. En tant qu'artiste, et plus particulièrement en tant que sculpteur, je suis fasciné par les artefacts tribaux, les objets de cérémonie, ainsi que les différents types de minéraux, les symboles, les masques, etc. Tous les supposés pouvoirs et énergies étaient transmis aux gens grâce à la magie de l'imagination et des symboles devenant ainsi des icônes significatives et nécessaires dans la vie de tous les jours.

Croyances, chamanisme, pouvoirs cachés et inspirations étaient autant de sources de magnétisme spirituel, psychologique et imaginatif.

Je voulais voir ces objets iconiques se refléter sur les facettes de mes sculptures et glisser d'un plan à l'autre : la réflexion était considérée comme magique dans l'Antiquité, sa découverte comme phénomène scientifique étant relativement récente historiquement. Je crois que mes sculptures sont des totems de la vie contemporaine, des leviers de gravité dans l'espace et un point d'exaltation possible de la pensée.

À partir de l'ensemble de mon travail, j'ai choisi des pièces partageant un lien fort avec celles des collections du musée : ces œuvres portent des noms évocateurs, souvent composés,

tels que SocialSkin, RockStone, Formation, FixingNature, RockGrowth, Ghost, LogShift etc., qui sont en quelque sorte liés au contexte de la collection.

Ma contribution à l'exposition s'articule en deux grandes parties : la première est fondée sur la juxtaposition de différentes typologies de mes sculptures qui côtoient les pièces soigneusement sélectionnées dans les collections du musée.

J'ai fait mon choix en tenant compte de plusieurs facteurs : ma collaboration avec la directrice du musée, Laurence Mattet et les suggestions qu'elle m'a faites, mes impressions après la visite du musée et de ses réserves et les discussions que j'ai eues avec ma collègue artiste et compagne de vie Zoé Ouvrier.

La seconde partie de mon travail pour cette exposition est une métamorphose dans le temps et les sens.

Dans un premier temps, j'ai sélectionné cinq pièces conservées dans les collections du musée : créées à l'origine pour donner une protection physique ou spirituelle à son porteur, pour une cérémonie spécifique, ou simplement pour transmettre de l'énergie et de la puissance, ces pièces se composent majoritairement de matériaux organiques périssables qui ne sont pas appelés à durer. Ces objets ont été fabriqués par des artistes ou des artisans spécialisés, au service des dieux ou des esprits.

Dans un second temps, j'ai utilisé des scanners 3D professionnels de pointe pour transformer chacun de ces objets en quelque chose d'intangible et d'éphémère. Ensuite, j'ai pris ces fichiers 3D et les ai travaillés, en les sculptant et élaborant en y appliquant mes propres idées et mon langage : j'ai ainsi interféré avec la fonction principale des cinq pièces des collections Barbier-Mueller, leur structure, leur morphologie et leur apparence ainsi que leur énergie intérieure et leur poids physique.

Les impressions 3D issues de ces fichiers modifiés ont ensuite été coulées dans le bronze, donnant ainsi naissance à une série de nouvelles pièces ayant chacune son sens, son apparence, son code et son énergie à part entière.

Des objets qui n'étaient traditionnellement pas destinés à résister à l'épreuve du temps, qui étaient généralement mangés par les termites ou brûlés, sont désormais capables de durer dans leur nouveau corps en bronze, donnant ainsi naissance à des nouveaux codes sociaux et à une nouvelle compréhension de l'histoire.

En Afrique, selon les régions, la pratique du bronze était peu répandue et elle n'existait pas dans ces formes. La matière est un véhicule qui détermine la culture et le lieu, le savoir et le savoir-faire, l'âge et le temps.

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Arik Levy

Je me suis toujours sentie proche de ce qui émane de l'art africain. Mes parents sont eux-mêmes des amoureux de l'Afrique. De ses voyages, mon père m'en rapportait ses senteurs et ses couleurs...

Cette empreinte est restée avec quelque chose d'encore plus profond chez moi, d'inconscient, comme si ce langage sensible m'appartenait.

L'art traditionnel africain s’inscrit dans la culture et des tradition des hommes et des femmes qui le réalise.

Je ne peux pas me comparer, mais je peux dire que de la même manière mon travail dépend de ce que je suis avec mes propres ressentis et ma propre expérience. Je l'exécute ainsi sans trop l'intellectualiser et il rejaillit comme un affect qui attend d'être touché... peut-être que c'est là ma reconnaissance.

J'aime ce rapport profond, parfois mystique, que la matière peut me procurer... La force du brut est ce qui me parle le plus.

Depuis mon plus jeune âge, tout ce qui vient du sol, de matières organiques, m'interpelle et m'offre un monde à explorer. Dans les graines, les branches, les feuilles, je vois des visages et des corps, toutes sortes de petits êtres vivants. Cela pourrait bel et bien venir d'un monde fantastique! Au fond, je suis restée cette petite fille qui aime s'aventurer dans sa sphère imaginaire...

Mais ce n'est pas tout, je permets d'entrevoir, avec mes gouges, le monde microscopique de nos cellules. Par le biais de la première couche de mon bois, je cisaille des formes donnant une trajectoire effervescente qui rend la surface vivante.

C'est là où mon message intuitif se conscientise et s'expose par l'allégorie du vivant, celui de nos entrailles, de ce que nous sommes, de ce que nous nous procurons. Il peut être sensuel ou autre, mais il est toujours lié à son origine. Cela me permet de ne jamais oublier que l'être humain a les mêmes cellules que le végétal ou l'animal. Notre source est commune, nous sommes issus de la même matrice et le tout fait une harmonie.

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Zoe Ouvrier

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